Impact du Plan National contre la Discrimination
I. C'est pendant la période de consolidation des institutions démocratiques et d'application des garanties constitutionnelles, à l'issue de la dictature militaire de 1976-1983, que la première loi spécifique en matière de lutte contre la discrimination a été adoptée. Il s'agit de la Loi 23.592 sur les Actes de discrimination qui garantit le droit des habitants de notre pays à vivre dans une société plurielle et équitable, dans le respect des principes de la Constitution nationale, et punit les actes de discrimination motivés par des raisons fondées sur la religion, la race, la nationalité, l'idéologie, le sexe, l'opinion politique ou syndicale ou sur des causes économiques, sociales ou physiques. L'adoption de cette loi permet d aborder correctement la problématique de la discrimination en Argentine car elle implique la reconnaissance et l'obligation, de la part de l'État, d'apporter des réponses à des pratiques discriminatoires déterminées.
En 1995, l'État argentin, par l'intermédiaire de la Loi Nº 24.515, crée l'Institut national contre la Discrimination, la Xénophobie et le Racisme (INADI) en tant qu organisme décentralisé. Lancé en 1997, il se trouve, depuis mars 2005 et conformément aux dispositions du Décret Présidentiel Nª184, sous la houlette du Ministère de la Justice et des Droits de l Homme de la Nation.
En octobre 2001, l'Argentine a honoré son engagement de préparer un Plan national contre la Discrimination dont les objectifs devaient coïncider avec ceux de la Déclaration et du Plan d'action de la Conférence de Durban qui s'est tenue la même année. Ensuite, en mars 2004, le Ministère des Affaires Étrangères, du Commerce international et du Culte, l'Institut national contre la Discrimination, la Xénophobie et le Racisme (INADI) et le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) ont signé et adopté le Projet ARG/02/024 intitulé Plan national contre la Discrimination. C'est sur ces bases qu ont été lancées les activités en vue d élaborer un document intitulé « Vers un Plan national contre la Discrimination. La Discrimination en Argentine. Diagnostique et propositions ». Celles-ci ont inclus un grand débat national regroupant différents secteurs de la société civile, des groupes défavorisés, des universités nationales, des commissions parlementaires ayant des compétences en la matière et les services du gouvernement impliqués. Le Décret 1086 du 27 septembre 2005, conséquence de ce processus, a traduit en norme la volonté politique de constituer une politique nationale intégrale de lutte contre la discrimination, avec l'adoption du document intitulé « Vers un Plan national contre la Discrimination » et en chargeant l'Institut national contre la Discrimination, la Xénophobie et le Racisme (INADI) de coordonner la mise en ouvre des propositions contenues dans ledit document.
II. L'engagement pris en 2005 par l'État national, par l'intermédiaire de l'INADI, vise à solder la dette sociale vis-à-vis de vastes secteurs de la population qui ont toujours été fragilisés et stigmatisés en leur permettant d'exercer, pleinement et largement, leurs droits. Dans ce nouveau cadre fondé sur la réparation, l'Argentine s'engage à lutter contre la discrimination sous toutes ses formes, tant à partir des avancées juridiques et institutionnelles qu'à travers l élaboration de politiques publiques anti-discriminatoires concrètes qui permettent d'étayer les transformations dans la société et de les rendre effectives.
Les actions de l INADI sont destinées à toutes les personnes qui voient leurs droits affectés parce qu'elles sont victimes de discrimination, en raison de leur origine ethnique ou de leur nationalité, de leurs convictions politiques ou de leurs croyances religieuses, de leur genre ou de leur identité sexuelle, de leur handicap ou maladie et de leur âge ou de leur aspect physique. Les fonctions de cet organisme visent à garantir les mêmes droits et garanties à ces personnes qu au reste de la société, c'est-à-dire à leur offrir un traitement égalitaire.
L'INADI a compétence pour recevoir des plaintes, enquêter, faire des campagnes et soutenir les victimes sur des questions liées à toutes les formes de discrimination. De plus, il mène des programmes visant à diffuser et à revendiquer les droits des groupes qui ont toujours été marginalisés en Argentine. L'Institut dispose de délégations dans toutes les provinces.
III. Impacts et débats socio-culturels.
La lutte contre la discrimination doit relever le défi, à l instar de ce qui se passe au niveau législatif et politique, d'avancer dans le domaine du changement culturel. Ce qui implique de changer certaines pratiques, attitudes et conduites menant à la stigmatisation et à la discrimination et qui sont largement répandues dans de vastes secteurs de la société.
Ces dernières années et, en particulier, depuis l'adoption du Plan national contre la Discrimination en 2005, le problème de la discrimination s'est installé dans le débat public et il y a chaque fois plus de référence institutionnelle à l'INADI comme organisme lié au débat social sur cette problématique et au besoin de l affronter. Selon les Cartes provinciales de la Discrimination en Argentine (qui étudient les perceptions, représentations et expériences sur la discrimination), conçues en 2008 par l'INADI, plus de 80% des personnes interrogées dans les 24 provinces déclarent qu il y a une très grande ou une grande discrimination dans notre pays.
De même, un pourcentage similaire de personnes interrogées déclare accorder un niveau d importance élevé ou moyen à la question de la discrimination par rapport aux autres problématiques. Concernant la perception des secteurs vulnérables souffrant d'une plus grande discrimination, les premières victimes identifiées sont les immigrés boliviens, les secteurs socio-économiques défavorisés, les personnes souffrant de surcharge pondérale/obésité et, avant la loi sur le mariage homosexuel, les homosexuels, les lesbiennes et les travestis. D autre part, les lieux où la discrimination s exerce le plus sont l'école, les discothèques, les entreprises, les magasins et les centres commerciaux.
Il convient de souligner que, depuis le début de l'année, l'INADI élabore une nouvelle version des Cartes de la Discrimination afin de répondre au besoin d étudier les impacts publics d'un ensemble de mesures importantes prises en matière de lutte contre la discrimination ces dernières années.
À cet égard, tant dans les médias que dans les espaces de discussion académique, le débat sur la façon de lutter contre les pratiques discriminatoires occupe une place croissante, grâce à l'action de l'État national et de l'INADI en particulier dans les campagnes d éducation et de communication visant à mettre en valeur le pluralisme social et culturel et à éliminer les comportements discriminatoires, xénophobes et racistes. Dans le but d atteindre ces objectifs, l'INADI organise et parraine de nombreux événements institutionnels, académiques, sportifs, culturels et sociaux pour informer sur les pratiques discriminatoires et les prévenir, en promouvant la participation citoyenne dans la transformation culturelle et sociale nécessaire pour lutter contre la discrimination.
D'autre part, les instances spécifiques se sont multipliées (avec la création de commissions, de secrétariats, d'organes de coordination, de forums) et englobent la thématique de la discrimination au sein des organismes publics, des diverses institutions de la société civile (syndicats, chambres de commerce, associations, fondations ) et des entreprises du secteur privé.
Il est essentiel de souligner, qu'au niveau des mouvements de la société civile, différentes expressions, provenant de divers secteurs de la société, se sont organisées afin de défendre leurs droits dans la lutte contre la discrimination. À certaines occasions, comme cela s'est produit de façon paradigmatique avec l'adoption de la loi sur le Mariage homosexuel (Loi 26.618) en 2010, il y a eu une coordination significative des priorités parlementaires dans la formulation des textes de loi, dans la promotion institutionnelle des divers secteurs publics pour la reconnaissance des droits et la mobilisation de vastes secteurs de la société en faveur de la conquête de revendications réclamées depuis longtemps.
Ce type d interactions entre les avancées juridiques et institutionnelles et le sentier de la conquête réclamé par les mouvements sociaux se sont également traduits par des mesures comme la Loi de Création du Programme national d Éducation sexuelle intégrale (Loi 26.150); la Loi pour l'éradication de la violence à l encontre des femmes (26.485); la Loi sur le Droit à la Protection de la Santé Mentale (26.657); ainsi que l'adoption de la Loi sur l'Identité du Genre. De même, des instruments de grande importance à niveau international, comme la Convention sur les Droits des Personnes Handicapées (ratifiée par l Argentine par l'intermédiaire de la Loi N° 26.378) et le débat actuel sur la Convention sur les Droits des Adultes Majeurs ont été formulés d après la perspective des droits de l'homme en intégrant la problématique de la discrimination.
IV. À partir de la reconnaissance effective de tous les droits fondamentaux, de l'élaboration de politiques anti-discriminatoires actives et de l'engagement de l'État national avec une perspective intégrale des droits de l homme, l'Argentine s apprête à ériger un cadre plus large d inclusion, accompagné de la promotion d'un changement culturel nécessaire pour lutter, de façon structurelle, contre les racines de la discrimination et construire une société ayant plus d'espaces de représentation, de reconnaissance et de participation citoyennes.